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Je passe mon temps à côté de lui. Je le regarde regarder dehors. Je le regarder dessiner des pendus sur toutes ses feuilles de cours plutôt que de les réviser. Je le regarde tourner sa cuillère trois fois dans sa tasse avant de boire son café au lait.
Je le regarde et mon cœur bat plus vite. Sans que je ne lui demande rien. Il bat et me fait mal à la poitrine. Lui, je ne l’ai jamais compris. J’ai essayé, mais il ne m’a pas laissé faire. On ne peut pas aimer ce que l’on ne connaît pas. Ca n’est pas moi, c’est mon cœur qui bat, c’est mon cœur qui l’aime.
Il ne parle presque jamais. Quand nous sommes à deux, nous ne faisons rien d’autres que d’être ensemble. Il me chatouille. Il ne me donne jamais la main. On ne fait pas l’amour régulièrement. On est constamment l’un à côté de l’autre, comme deux aimants qui ne se touchent jamais. Nous sommes bizarres.
J’ai compris que tout ça n’était pas l’enchaînement logique de notre vie à deux mais les conséquences de l’absence de la leur.
A elle et lui.
Ce couple qui est enterré depuis longtemps dans la bouche de tous ses proches à lui et qui n’existe même pas dans la sienne. Julien m’avait juste dit une fois, que je lui ressemblais beaucoup. Personne d’autre. Je n’y pensais plus. Je croyais qu’elle n’avait plus d’importance.
C’était hier à la crémaillère de Nicolas. Je nettoyais mon pull sur lequel j’avais renversé de la sangria quand il m’a pris le bras pour me traîner presque en courant vers le fond de la pièce. Elle était là. Il l’avait vu. Il voulait lui parler. Quand j’ai pour le première fois levé les yeux sur elle, ça ne m’a pas frappé directement. Oui, les traits de nos visages se ressemblaient assez et nos cheveux nous arrivaient à toutes les deux dans le bas du dos. A part ça elle était plus petite, et avait les yeux bien plus foncés que les miens. Mais j’ai surtout compris en m’approchant de son visage pour lui dire bonsoir. Nous avions le même parfum. Cette odeur dans le nez et le nez collé à terre, j’ai regardé nos ombres l’une à côté de l’autre. Nous étions jumelles. Hélène et moi.
J’ai appris à aimer ses silences. Au début, il me disait des choses, il me parlait de lui. Je pense qu’il savait que je l’écoutais vraiment, que j’en étais capable. Je crois qu’il avait envie de me laisser lui explorer le cerveau, comme il se plaisait à dire. Juste pour voir si quelqu’un pourrait le comprendre comme elle pouvait le faire.
Je pense sincèrement qu’au début il ne savait pas. Il n’a pas du comprendre que son enthousiasme face à moi ne lui venait que de ma ressemblance physique avec elle. Il s’était permis d’y croire parce qu’il l’avait vu en me regardant.
On s’est embrassé un soir, très tard, après avoir écouté un cd de Janis Joplin en entier qu’il disait adorer. Je sais aujourd’hui que la désillusion s’est produit à ce moment précis. Quand en goûtant ma bouche, il s’est rendu compte que je n’avais pas la même saveur qu’Helene. Depuis, il ne parle plus.
Je me suis laissée berner par ses sourires et ses mains qui me touchent. J’ai cru jusqu’à hier que je comptais vraiment. Il y a aussi que, je l’admets, sa présence me suffisait. M’évitait de me poser des questions. Son comportement, même si étrange, ne me dérangeait pas parce qu'il le rendait parfaitement singulier. C’est de cette façon que mon cœur se mettait à battre vite. Juste à côté de lui. J’observais chacun de ses mouvements et ça me donnait le sentiment de le connaître par cœur.
Je sais quel genre de mimique fait sa bouche quand il joue de la guitare. Je sais de quelle façon il tourne ses cheveux dans ses doigts quand il cherche une chanson sur son ordinateur. Je sais que son œil gauche se crispe quand il fait un cauchemar.
Je sais toutes ces choses qu’il ne sait pas lui même. Ca me permet de ne pas avoir besoin de ses mots. Parce que malgré tout, je connais ses secrets. Je le connais à ma façon. Comme personne.
Je justifiais mon amour déraisonnable pour lui avec ce que j’avais. Presque rien. Bien assez pour que mon cœur l’aime.
Il parlait malgré tout. Parfois pendant des heures. Il me parlait de ce film. Me racontait ce concert. Avec cet enthousiasme qu’il sait avoir pour tout ce qui le passionne. J’analysais chacun de ses mots dans l’espoir d’y trouver un sens plus profond, la clef de son cerveau, pour pouvoir le comprendre enfin. Mais quand il parlait, ça n’était pas avec de vrais mots. C’était avec une sorte de vide qui faisait du bruit. Ca voulait dire des choses mais plus encore ça voulait dire qu’il n’avait rien d’autre à me dire. Malgré tout je gardais chacun de ces mots vides précieusement. Je voulais le comprendre. Justifier cet amour qui me venais de je ne sais où. Comme si, inconsciemment, je savais déjà qu’il me faudrait un jour me justifier du fait qu’il était aujourd’hui celui que mon cœur aime. Comme si tout le monde savait que mes raisons ne valaient rien.
Je ne me suis jamais demandée s’il m’aimait ou non. Je crois que je savais, un peu comme une évidence, qu’il ne m’aimait pas. Pas comme ça. Et ça ne comptait pas vraiment. Je me demandais par contre souvent ce qu’il aimait dans ma présence. Je savais que tous les mots qu’il me donnait aurait pu être donné à d’autres. Que ce qu’il me donnait de lui même n’avait rien d’exceptionnel. C’était aussi vide que tous ses mots. Pourtant, il continuait de réclamer ma présence. Il insistait. M’attendait parfois des heures à la sortie du travail. Mais une fois que j’étais là, rien sur son visage ne me disait je t’aime.
Mais on aurait dit parfois qu’il en avait besoin, de ma présence.
Je sais aujourd’hui qu’il avait besoin d’elle et que j’étais celle qui la lui rappelait le plus à cause de cette odeur, de cette ombre, que je partage avec elle. Si j’étais avec lui, il ressentait moins l’absence d’Helene. Alors qu’avec une autre fille. Une qui aurait senti la vanille et qui aurait eu les cheveux courts, il aurait été obligé d’admettre qu’elle n’était plus là.
Qu’elle était partie et qu’elle ne reviendrait pas.
Il savait bien tout ça. Sa façon d’utiliser mon corps pour masquer sa réalité. Ca lui faisait mal. Parfois je me réveillais pour le trouver recroquevillé au bout de son lit. Il me sortait alors son éternelle tirade. Celle que je connais par cœur et que je n’ai compris qu’hier. Il disait qu’il n’était pas ce genre là, celui qui fait mal. Qu’il ne pouvait pas continuer. Il pleurait. Parfois il se rendormait simplement, d’autres, il me quittait. Mais toujours, il finissait par me téléphoner quelques jour plus tard pour me dire qu’il avait vu ceci ou qu’il faisait ça. Et il me demandait si je pouvais sécher les cours du lundi matin et venir dormir chez lui ce soir. La plupart du temps il ne me touchait même pas. Il se collait juste tout contre moi et s’endormait. On passait des fois des semaines sans même s’embrasser. Et toujours, au bout d’un moment, il se réveillait la nuit, après que son œil gauche ce soit crispé, et il me faisait l’amour comme si on ne c’était pas vu depuis 101 ans.
Au début, je lui posais des questions. Pourquoi ses silences ? Pourquoi ses absences ? Pourquoi tu ne me regardes pas ? Pourquoi moi ? Il me fixait et ne répondait rien. J’ai vite arrêter de me demander quoi que ce soit. C’est à ce moment là que j’ai commencé à le regarder. A l’aimer de loin même quand son corps était collé au mien. Je ne lui posais plus aucune question sur nous. Aux yeux des autres nous n’étions qu’amis. Personne ne savait comme mon cœur en était folle. Et le fait que cette histoire soit à ce point mon secret me faisait l’aimer encore plus fort.
Je n’étais pas heureuse. J’aimerais pouvoir dire que l’aimer me suffisait. Mais je ne sais pas mentir. Je savais qu’il ne m’aimait pas. Je pouvais le sentir à chacun de nos regards manqués. Il était à des kilomètres de moi, même quand nous dormions l’un dans l’autre. Il ne me regardait dans les yeux qu’après les tirades où il décidait de me quitter. Droit dans les yeux. Comme s’il n’y avait que dans ces moments où il tentait d’être fort, où il abdiquer face à sa propre faiblesse, qu’il acceptait le fait que j’avais une identité propre. J’étais quelqu’un qui n’était pas le fantôme d’une autre. Mais il retombait dans sa faiblesse, toujours. Et il ne me regardait plus. Parce que mes yeux qui étaient notre plus grande différence, à elle et moi, le renvoyaient bien trop l’image du salaud qu’il était. Lui rappelait qu’il laissait mon cœur me démolire la poitrine tout en sachant que je n’étais pour lui, qu'une sorte de morphine.
Je pensais juste qu’il était « comme ça ». Pas curieux, pas intéressé. J’aurais pu le quitter sauf que je me rappelais toujours comme ma présence comptait pour lui. Ce besoin qu’il avait que je sois toujours là. Je me rappelais aussi que je ne le comprenais pas. Je me disais que ce que j’étais pour lui m’échapper donc totalement. Sans le comprendre lui, je ne pouvais pas comprendre ses raisons. Je me contenter de savoir pourquoi moi j’étais là.
Sauf qu’hier je l’ai vu être curieux et intéressé. Je l’ai vu la regarder comme je le regarde. J’ai compris qu’il savait faire. Il n’était pas « comme ça ». Il était juste horriblement faible.
Les autres m’avait parlé d’elle comme de la seule qui le comprenait. Maintenant je sais qu’elle était la seule à le comprendre parce qu’il l’avait choisit. Il n’a même pas essayé de se faire comprendre d’une autre. Il n’avait pas envie. Pas le courage. Il ne m’a pas laissé faire. Il n’a pas le droit de s’en plaindre.
Ce matin j’ai teint mes cheveux en roux. Je voulais le faire depuis mai dernier. Ca me va plutôt bien. Il m’a téléphoné pour savoir avec qui j’étais rentrée hier soir. Il ne m’avait pas vu partir. Il me dit qu’il sera là dans deux heures. Il voudrait qu’on aille marcher quelque part. Sûrement du côté du zoo. J'ai dit d'accord. J'ai raccroché. Je suis allée me dévisager dans le miroir de la salle de bain. Je commençais à détester tout ces bouts de visage qui me faisaient ressembler à Helene. J’ai eu envie de m’arracher la peau. Il fallait tout changer. Je me suis maquillée comme je ne le fais jamais. Je suis descendue dans le jardin. Je jouais avec mes cheveux pour essayer de changer ce reflet noir de moi même. Je les ai attaché. Roux et attaché. Je regardais mon ombre dans l’herbe. Je l’étudiais soigneusement. Je vérifiais que cette ombre n’était plus qu’à moi. Surtout, ne plus lui ressembler. J’ai fouillé dans l’armoire de ma mère, et j’ai pris un de ses vieux parfums. J’en ai mis partout dans ma chambre. Et je suis restée là, assise sur le parquet, jusqu’à ce que mes habits se soient imprégnés de cette odeur étrangère. Nous n’étions plus jumelle. Quand j’ai ouvert la porte il m’a regardé fixement. Comme les fois où il me voyait moi et pas elle. Le même regard mais avec un sourire perplexe. Il s’est approché pour m’embrasser mais il ne l’a pas fait. A cause de cette odeur qui lui rappelait qu’elle n’était pas là.
Quelle était partie et qu’elle ne reviendrait pas.
Moi non plus.
Commentaires :
MangakaDine |
Ceci est un commentaire absolument égocentriqueAttention, y'a rien de constructif dans les mots suivant. :( C'est bien de le préciser avant de lire. Je le regarde et mon cœur bat plus vite. Sans que je ne lui demande rien. Il bat et me fait mal à la poitrine. Lui, je ne l’ai jamais compris. J’ai essayé, mais il ne m’a pas laissé faire. On ne peut pas aimer ce que l’on ne connaît pas. Ca n’est pas moi, c’est mon cœur qui bat, c’est mon cœur qui l’aime. Il ne parle presque jamais. Quand nous sommes à deux, nous ne faisons rien d’autres que d’être ensemble. Il me chatouille. Il ne me donne jamais la main. On ne fait pas l’amour régulièrement. On est constamment l’un à côté de l’autre, comme deux aimants qui ne se touchent jamais. Nous sommes bizarres." Je sais quel genre de mimique fait sa bouche quand il joue de la guitare. Je sais de quelle façon il tourne ses cheveux dans ses doigts quand il cherche une chanson sur son ordinateur. Je sais que son œil gauche se crispe quand il fait un cauchemar. Je sais toutes ces choses qu’il ne sait pas lui même. Ca me permet de ne pas avoir besoin de ses mots. Parce que malgré tout, je connais ses secrets. Je le connais à ma façon. Comme personne. Je justifiais mon amour déraisonnable pour lui avec ce que j’avais. Presque rien. Bien assez pour que mon cœur l’aime." Je ne me suis jamais demandée s’il m’aimait ou non. Je crois que je savais, un peu comme une évidence, qu’il ne m’aimait pas. " |
ryne 26-09-07
à 19:12 |
Re: Ceci est un commentaire absolument égocentriqueTa nouvelle, son début est encore enfermé dans les brouillons de ce blog. Je n'arrive jamais a continuer une nouvelle déjà commencé. Il faut que je l'écrive d'un coup où que je ne l'écrive pas. Ca m'embête.
Si je me force les mots sortent de travers. Mais peut être qu'un jour, j'en sais rien. Je garde ces mots là au cas où. Merci pour ce commentaire, même s'il n'eest pas constructif. |
MangakaDine 27-09-07
à 22:56 |
Re: Ceci est un commentaire absolument égocentriqueJ'espère qu'un jour....
Ca serait dommage de laisser ça au fond d'un placard de blog, quand même. |
aphone 26-09-07
à 19:17 |
Moi j'étais à fond dedans, même si je connaissais l'histoire, je connaissais pas la fin et ça m'a plu =) Et puis je reconnais les détails qui font penser à. Drôlement inspirée ta nouvelle ^^
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Songe 13-11-07
à 09:44 |
Très jolie, sensible et fragile cette histoire, je découvre et j'aime beaucoup cette parenthèse dans une autre intimité.
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ryne 13-11-07
à 11:00 |
Re:Merci beaucoup songe... Avec la grève qui reprend, je vais avoir un peu de temps pour en ecrire une autre. Avec un peu de chance, elle sera un peu moins niaise ;) |
Songe 13-11-07
à 11:35 |
Re:Mais non, des choses niaises il y en a à foison sur les blogs mais là je trouvais ça plutôt naturel et émouvant. L'essentiel est d'écrire ce qu'on a envie pour soi et les gens qui l'apprécient :)
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ninoutita 29-01-08
à 19:22 |
J'ai dû lire tous les commentaires pour m'assurer que cette nouvelle était... bha une nouvelle.
J'adore. |
LiliLou 22-02-10
à 22:07 |
Comment j'ai réussi à louper ces jolis mots, dire que je ne suis jamais tombée par ici.
C'est tendre, j'te garde en poche =) (Oui on me l'avait bien dit que t'avais des mots d'anges) |
à 00:27